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Agriculture en Afrique : Qu’en est-il de son financement ?

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Agriculture en Afrique : Qu'en est-il de son financement ?
Agriculture en Afrique : Qu'en est-il de son financement ?

L’agriculture en Afrique bénéficie de moins en moins des financements d’État. Les entrepreneurs individuels et les PME qui représentent la majorité des acteurs du secteur ont difficilement accès au financement. Comment l’Afrique peut-elle réellement maximiser son potentiel agricole et permettre aux africains de jouir des richesses du sol de leur continent tout en nourrissant le monde ?

Pourquoi devons-nous libérer le potentiel agricole de l’Afrique ?

En 2015, Akinwumi A. Adesina, président de la BAD affirmait que c’est le seul secteur capable à la fois de réduire de plus quatre fois le taux de chômage et de pauvreté en Afrique. Le cadre de la BAD précise en effet que l’agriculture est « une industrie qui aidera les pays [africains] à diversifier leur économie, à réduire leur dépendance aux importations de denrées alimentaires, à créer des emplois et à revitaliser les zones rurales. »

Ce n’est plus un secret, le secteur agricole africain ou l’industrie de l’agriculture en Afrique pour être plus précis, est un puissant levier du développement de l’Afrique. D’ailleurs, c’est le principal levier du développement économique et social de ce continent qui possède 65% des terres arables restantes sur la planète.

Vu sous cet angle, on comprend clairement qu’il est impossible de nourrir les 9,8 milliards que comptera la planète en 2050 (ONU) si le potentiel agricole de l’Afrique n’est pas libéré au plus tôt.

N’est-ce pas surprenant de réaliser que l’Afrique (notamment l’Égypte, le Nigéria, le Soudan, la Tanzanie, l’Algérie, le Kenya et l’Afrique du Sud) a importé près de 4 milliards de dollars USD de Russie en 2020 ?

Et comment comprendre que pour la même année, le continent ait importé de l’Ukraine près de 2,9 milliards de dollars de produits agricoles, notamment, le blé, le maïs, le soja, l’orge et l’huile de tournesol ?

Cette dépendance fatale coûte actuellement cher aux Africains puisqu’ils doivent payer très cher pour avoir des denrées alimentaires depuis le début de la guerre russo-ukrainienne. Face à ces constats, la même question tourne dans les esprits.

L’agriculture en Afrique et le financement agricole : un défi à relever

La question du financement est omniprésente dans les discussions relatives à l’agriculture en Afrique. La FAO estime que 10% des budgets des États africains devraient être consacrés à l’alimentation et à l’agriculture pour impulser le développement économique et social africain.

Pourtant, pour des raisons que peu de gens ignorent, le financement d’État peine à combler les attentes des acteurs. Si dans certains pays, les ressources allouées au développement agricole sont suffisantes, dans d’autres, elles sont tout simplement mal gérées.

En d’autres termes, les banques nationales africaines donnent l’air d’être incapables de financer efficacement le développement du secteur agricole. Or, le secteur bancaire traditionnel semble n’avoir pas trouvé la formule idéale pour concevoir des instruments de financement adaptés aux besoins des acteurs agricoles.

Cet état de choses s’explique par le fait que la taille et le mode d’organisation des activités agricoles sont parfaitement asymétriques aux principes de financement classiques des banques. En Afrique, les activités agricoles sont généralement informelles, atomisées, avec un taux de risque souvent rédhibitoire.

Comment adapter le financement bancaire à la taille et à la structure des activités agricoles africaines ?

Étant donné que le secteur agricole est majoritairement saisonnier, la réactivité des institutions bancaires aux demandes de financement est capitale pour accompagner les efforts des acteurs de la filière. Mais pour que ce besoin de réactivité qu’expriment les acteurs contraste souvent avec les exigences de la politique bancaire de gestion de risques liés aux crédits.

Ainsi, le principal aspect sur lequel il faudra agir, c’est bien la formation. Les institutions bancaires doivent penser à former des chargés d’affaires et des responsables de crédit qui seront, de façon spécifique, chargés d’identifier et d’analyser les risques liés à la filière agricole en général puis à chaque demandeur de crédit en particulier.

Le facteur mis en lumière ici est bien celui de la proximité. En fait, il serait intéressant d’approcher l’industrie agricole, non dans son ensemble, mais en fonction des différents maillons qui la composent.

La question ne sera donc pas de savoir comment financer les producteurs, car le secteur agricole n’est pas seulement composé de la filière agricole, mais aussi de la collecte, la transformation, le transport et la distribution, la fourniture et l’installation d’équipements et d’infrastructures, etc.

Il s’agit donc pour les banques, dans un premier temps, de mieux s’approprier la filière en analysant de façon exhaustive toutes les chaînes de valeur qui la composent. Cette approche impose par conséquent que des agents bien formés soient déployés de terrain dans le cadre d’une stratégie de proximité.

Ces derniers pourront ainsi observer les réalités, rencontrer et discuter avec les entrepreneurs agricoles et autres acteurs à la base afin d’une part de déconstruire les préjugés et idées préconçues et d’autre part, de mieux apprécier les facteurs de risque lié au secteur.

Cette politique de proximité permettra aux banques de concevoir des produits de financement plus adaptés et d’élaborer des stratégies pouvant minimiser le risque lié au financement agricole. Elles peuvent par exemple choisir de proposer un financement à long terme tout en libérant les ressources par palier et en fonction des résultats.

La finance inclusive, un levier indispensable pour réussir le financement de l’agriculture en Afrique

Pour accompagner le développement dans les économies émergentes, il faut nécessairement trouver une alternative à la finance traditionnelle qui tend à exclure les acteurs de petite et de moyenne taille qui représentent pourtant 90% du secteur privé et 33% du PIB africain.

La finance inclusive doit donc être le principal levier sur lequel doivent reposer les efforts de financement agricole en Afrique, puisque la majorité des acteurs ont une taille atomique, une structure insuffisamment formelle.

L’efficacité de cette approche a déjà été éprouvée et confirmée par des institutions de financement telles que le groupe Cofina, qui a réussi à se positionner sur le marché comme une institution panafricaine de mésofinance en déployant une stratégie de proximité efficace pour accorder des microcrédits aux PME et aux entrepreneurs individuels.

Alors, comment déployer cette approche ? Certainement par le financement d’associations d’agriculteurs, l’alphabétisation, la formation et le conseil des locaux aux nouvelles méthodes de production et de transformation, l’investissement matériel notamment par l’approvisionnement en intrants, la fourniture d’équipements et de machines agricoles pour la production, la collecte, le transport, la transformation, etc…