Le 27 décembre 2021, le Président du Sénégal Macky Sall inaugurait le Train Express Régional, TER. Ce nouveau transport constituait un volet phare du Plan Sénégal Émergent (PSE), un programme de développement s’étendant jusqu’en 2035. Lancé pour moderniser les transports de la métropole, il vise à diminuer le trafic routier de la capitale et sa banlieue. Après 5 années de travaux et une mise en service repoussée plusieurs fois depuis fin 2016… Où en est-on, deux mois après l’inauguration ?
Le TER de Dakar, « un des moyens de transport les plus modernes du monde »
C’est ainsi que Stéphane Volant, président du conseil d’administration de la SETER, société d’exploitation du TER, considère ce nouveau projet ferroviaire.
L’engorgement des routes dakaroises aux banlieues est un problème majeur de la capitale. Durant les heures de pointe, les routes inter-capitale sont pratiquement impraticables, avec souvent des heures d’embouteillages. Sans parler de la sortie de Dakar, route allant à Diamniadio, le nouveau centre d’affaires. ». D’autre part, un document de la Banque africaine de développement affirme qu’en effet, le transport actuel ne répond pas « de manière satisfaisante aux besoins des déplacements estimés à 124 000 passagers en heure de pointe».
Le projet ferroviaire du TER est le premier du genre en Afrique de l’Ouest francophone. 15 trains fonctionnant à l’électricité le composent et 14 gares sur un linéaire de 35 km. Proche de l’autoroute à péage, des lignes de bus rapides devant bientôt circuler sur des voies prioritaires seront installés.
Ce TER, censé relier en une vingtaine de minutes les 36 kilomètres séparant Dakar et Diamniadio en roulant à une vitesse de 160km/h, devait améliorer la situation. Ainsi, durant les 15 premiers jours d’ouverture du projet, un programme découverte était offert à tous les passagers. L’objectif est d’attirer un maximum de prospects afin de leur faire découvrir ce nouveau moyen de transport. Par la suite, au-delà de ces deux semaines de départ, les tarifs iront de 500 Francs CFA en classe économique à 2 500 Francs CFA en première classe.
Un projet coûteux
Le projet du TER a un coût global de 780 milliards de Francs CFA, avec des prêts de :
- 235.3 milliards de Francs CFA de la France
- 111 milliards de la Banque Africaine de Développement
- 196.6 milliards de Francs CFA de la Banque Islamique de Développement.
La participation du Sénégal, elle, s’élève à 150 milliards de Francs CFA.
Par conséquent, il s’agit d’une somme colossale dépensée, qui se retrouve donc très controversée. Certains voient le projet comme un succès et une avancée dans l’émergence du Sénégal. En revanche, de nombreuses personnes considèrent le projet trop coûteux, et non prioritaire.
Quelles retombées, deux mois après l’inauguration ?
Amina Bayo, responsable d’un collectif dénonçant le projet comme trop coûteux et réclamant 76 millions d’euros d’indemnisation à l’Etat, affirme : « Le TER nous a appauvris ». Demba Moussa Dembélé, économiste sénégalais, pense que « l’argent investi dans le TER aurait pu servir à réhabiliter le réseau ferroviaire sénégalais. Le TER n’était pas une priorité ».
« Pour être financièrement rentable, le TER devrait être presque rempli à toute heure de la journée. Ceci ne serait possible que si le trafic de personnes est également intense sur son réseau, aussi bien dans le sens Diamniadio-Dakar, que dans le sens Dakar-Diamniadio. Cela ne semble pas encore être le cas. » annonce Papa Demba Thiam, économiste sénégalais.
En ce qui concerne l’affluence dans ce nouveau transport, deux mois après l’inauguration, le TER est très convoité. Tous les jours, notamment aux heures de pointes, il faut y faire la queue pour y avoir une place. Cependant, on remarque que ce train visant à offrir une solution de transport pour toute classe sociale, accueille une majorité de personnes venant de la classe moyenne. En effet, difficile pour un sénégalais qui gagne le SMIC de payer une telle somme tous les jours. Il préférera emprunter les bus collectifs, aussi appelés Tata et Ndiaga Ndiaye, pour environ 150 Fcfa le trajet.
Aujourd’hui, il est encore trop tôt pour mesurer l’efficacité du projet. De nombreux regroupements de personnes et professionnels de l’économie ont des avis mitigés sur les retombées en termes d’économie, de financement et de risques. Néanmoins, la population est en général satisfaite de la qualité du transport fourni.