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Le cinéma sénégalais en pleine renaissance

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Le cinéma sénégalais en pleine renaissance
Le cinéma sénégalais en pleine renaissance

Le cinéma sénégalais est considéré comme l’un des plus dynamiques du continent africain. Les productions issues de cette industrie font très régulièrement l’objet de récompenses au sein de nombreux festivals africains et internationaux. On a pu le voir avec le film « Félicité » du réalisateur franco-sénégalais Alain Gomis. Il avait ainsi remporté le Grand Prix du jury à la Berlinale 2017, l’Etalon d’or de Yennenga et le grand prix du Fespaco. Mais cette industrie encore fragile repose essentiellement à l’heure actuelle sur un guichet public de financement.

Une histoire du cinéma aux origines de l’indépendance

On peut affirmer sans mal que les origines « historiques » du cinéma sénégalais remontent à plusieurs années, avant-même l’indépendance du pays alors que la population se pose déjà des questions sur son identité réelle. C’est avec le film « Afrique-sur-Seine » sorti en 1955 que le réalisateur Paulin Soumanou Vieyra dresse les contours d’un cinéma d’Afrique subsaharienne. Dans un contexte politique où la loi française interdisait aux citoyens des colonies de faire des films. Le long-métrage de Vieyra, porteur d’espoir, traite du déracinement et de la solitude des populations africaines à Paris.

Dès le passage du pays à l’indépendance, le cinéma sénégalais prend résolument son envol, à travers la production de diverses fictions et documentaires qui allaient raconter, notamment, les relations tumultueuses avec le monde et la France. Sorti en 1968, « Le Mandat » du réalisateur Sembène Ousmane, raconte sous la forme d’un authentique manifeste cinématographique les difficultés d’un simple citoyen avec l’administration sénégalaise : Entièrement tourné en wolof (un dialecte local), le film relate l’histoire d’Ibrahima Dieng recevant un mandat de 25 000 francs CFA de la part de son neveu, immigré à Paris. Heureux de pouvoir faire le bien autour de soi avec cet argent, Ibrahima déchantera rapidement lorsque la Poste refusera de lui remettre cet argent sans présentation d’une carte d’identité.

Mais ce sont véritablement les années 1970 qui voient arriver un véritable âge d’or pour le cinéma sénégalais : à l’époque, le public se presse dans les salles de cinéma et adhère totalement à l’œuvre de cinéastes dont le talent s’exportera sans mal à l’étranger, auprès des plus grands festivals internationaux. On pense notamment au Festival de Cannes, de Venise et de Carthage.

Un art dynamique pénalisé par un manque d’engagement

Alors considéré comme l’un des plus florissants du continent africain, le cinéma sénégalais éprouve depuis plusieurs années d’importantes difficultés. En 2007 Oumar Ndiaye, alors Secrétaire Général du Festival du Film de Quartier déclarait : « Depuis la fin des années 1990, à part le Paris qui a été démoli, nous n’avons plus de cinéma. Dakar est devenu un écran noir […]. Je pense que nous sommes les seuls à pouvoir sauver notre cinéma. Bien entendu, il faut que les banques s’impliquent mais pour cela, il faut que les projets soient viables et qu’on essaie de faire des films qui tiennent compte au maximum des préoccupations de la population ».

Malgré une telle situation de fragilité, le cinéma sénégalais continue d’afficher une remarquable santé à l’étranger et parvient toujours à s’exporter dans de nombreux festivals européens. Le problème actuel du cinéma sénégalais est double : d’un côté, les observateurs les plus attentifs de la vie culturelle sénégalaise dénoncent un manque d’engagement manifeste de l’Etat. De l’autre, on constate un très faible nombre de salles de projection au Sénégal, ce qui explique que les productions sénégalaises soient souvent mieux connues à l’étranger. L’Etat, bien sûr, défend une « politique de relance de ce secteur » par la voix du directeur de la cinématographie au ministère de la Culture et du Patrimoine Historique Classé, Amadou Tidiane Niagane.

Une renaissance de l’industrie depuis 10 ans

Le cinéma sénégalais connaît, malgré ce sombre tableau, une véritable renaissance depuis une dizaine d’années. Le secteur se professionnalise, en même temps qu’il développe de véritables filières d’apprentissage. Certains artistes du milieu, comme le producteur Oumar Sall, sont à l’origine d’initiatives qui contribuent à stimuler l’envie de création chez les nouvelles générations. En 2013, il lance ainsi une formation de dix mois aux métiers du cinéma et de la production, baptisée Upcourt métrages. Une formation permettant à des jeunes en provenance de toute l’Afrique de s’initier aux divers aspects de cette industrie culturelle.

L’industrie cinématographique sénégalaise continue cependant d’être soumise à un modèle qui entretient sa fragilité. En effet, son écosystème repose avant tout sur un guichet public de financement : le Fonds de promotion du cinéma et de l’audiovisuel (ou Fopica), mis en place par les autorités à partir de 2002. Selon Baba Diop, qui enseigne l’histoire du cinéma pour Upcourt-métrages, « L’installation du Fopica a fait prendre conscience qu’un cinéma ne doit pas seulement être un cinéma de cinéastes, mais qu’il fallait également fabriquer une véritable industrie cinématographique » .

Rappelons que le prix moyen d’une place de cinéma est de 2 000 francs CFA – soit l’équivalent de 3 euros. Une situation qui continue de rebuter une large partie de la population au Sénégal.